
Quel est ton parcours dans le milieu du reggae ? Avec qui as-tu collaboré auparavant ?
Commençons par le début. Dans les années 60, nous étions pas mal influencés par les chanteurs de soul et de rhythm’n blues américains. Norris Weir, Keith « Jerry » Brown, Mibsie Corey, Martin Williams et moi avons décidé de former un groupe : The Jamaicans. Nous étions, à l’époque des camarades d’école, sauf Martin Williams qui était plus âgé. C’est lui qui nous a appris à chanter des harmonies. J’étais le chanteur principal et aussi co-auteur (des paroles) avec Norris Weir qui était le « bassman ». Par la suite, Tommy Cowan a remplacé Mibsie Corey après de nombreux changements. Après The Jamaicans, j’ai réalisé cinq morceaux sous le nom de Ricky Storm : mon premier single en 1972 The Way It Is, puis Cuban Cutlass, et Dunny Dun en 1973, Zion Pathway en 1974, Follower, fin 1974-début 1975. Ensuite, en 1976, j’ai changé mon nom pour Kong. Mon nom de famille est Kong. D’ailleurs Leslie Kong, de Beverley’s record, est mon oncle. J’ai fait l’album The Way It Is en 1976. Dans les années 70, j’ai collaboré avec Bunny Rugs, qui plus tard est devenu célèbre en étant la voix de Third World. Nous avons réalisé des morceaux ensemble tels que Freedom Fighter ou Bushweed Corntrash sous le nom de Ricky & Bunny. J’étais Bushweed et Bunny était Corntrash, c’est comme ça qu’on nous appelait. Nous avons donc fait ces morceaux pour Lee « Scratch » Perry. C’est un génie. Nous avons fait pleins de belles choses
ensemble. Il a du caractère, mais il est fantastique. J’ai aussi chanté avec Kes Chin & The Souvenirs, Carlos Malcolm & the Afro-jamaicans, The Skatalites qui étaient mes idoles. Ils jouaient de la très bonne musique. Jusqu’à aujourd’hui, je pense que les meilleurs morceaux instrumentaux de l’histoire de la Jamaïque ont été joués par The Skatalites. J’ai collaboré avec beaucoup d’artistes parce qu’à cette époque nous n’étions pas égoïstes ; nous nous aidions les uns, les autres. Il y avait une ambiance fraternelle et d’amour de la musique qui nous rassemblait. Cet état d’esprit était en lien avec l’indépendance de la Jamaïque (1962) qu’on venait d’acquérir.
As-tu déjà fait des tournées dans le passé ?
Cela fait presque 50 ans que je chante et cet été va être ma première tournée. Cela peut paraître étrange mais c’est vrai. Je ne sais pas pourquoi. Plein de personnes ont essayé de me trouver en Jamaïque et n’y sont pas parvenues alors ils sont repartis. Mais je suis là maintenant et je suis heureux d’être là. On a l’intention de continuer notre collaboration et de travailler sur un nouveau disque. J’espère que cette tournée sera un tremplin et que ça nous permettra de découvrir d’autres pays.
Que penses-tu de l’état du reggae aujourd’hui ?
Le dancehall, dans sa forme actuelle, pour moi, ce n’est pas du reggae. Beaucoup de jeunes ont été influencés par le hip-hop et la soca. Alors que le reggae c’est d’abord la batterie et la basse. Si tu n’as pas de
batterie ou de basse, ce n’est pas du reggae. Aujourd’hui, le dancehall c’est plus du hip-hop et du calypso. J’aime bien certains artistes comme Sizzla Kalonji. Mais le message des paroles du dancehall me dérange. Le thème c’est toujours les femmes, l’argent et les armes. Ils s’éloignent trop du message du « tout puissant » qui est paix et amour. Le but du reggae c’est d’éduquer et d’élever la conscience morale. Mais ces dernières années, il y a eu une sorte de résurgence du roots rock reggae qui est le côté spirituel du reggae. Bob Marley, moi-même, Yabby You, Burning Spear, Black Uhuru, tous ces groupes ont fait du roots rock reggae. Le reggae c’est la musique du King, c’est-à-dire l’empereur Haïlé Sélassié, notre Dieu, notre roi.
Est-ce que la musique est une question de religion alors ?
Non, d’autres le pensent, mais moi je la vois plutôt comme une manière de vivre. C’est un moyen de communication. Les religions provoquent des guerres dans le monde.
Y-a-t-il d’autres genres de musique que tu apprécies ?
J’aime tous les genres. J’aime le classique : Bach, Beethoven, Tchaïkovski, Chopin, … Le jazz, le rhythm’n blues, le delta blues, le calypso (Mighty Sparrow, Mighty Douglas), le negro spiritual (Mahalia Jackson), Myriam Makeba, la soul, le funk…Mais je n’aime pas le rap à cause du message qu’il véhicule.
Est-ce que tu fais autre chose que de la musique ?
Lorsque mon dernier fils est né, j’ai essayé de tenir une petite ferme. Mais je ne suis pas un grand fermier ! C’est finalement grâce à ma femme, la mère de Skunga, que l’on a survécu.
Tu aimerais ajouter quelque chose ?
J’aimerais faire un big up à : Lee « Scratch » Perry, Bernard Collins & The Abyssinians, tous les habitants de Trenchtown et de Maxfield avenue, Rhythm & The Originators, Leroy Sibbles & The Heptones, Tabby & The Mighty Diamonds, Small World Crew, Flabba Holt & Style Scott, Bunny Wailer, Jah Mikes, Big Youth…
Source : http://epic-magazine.ch/retour-aux-racines-du-reggae-avec-i-kong/l

I Kong
"Le but du reggae c’est d’éduquer et d’élever la conscience morale"
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