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1. Qui est Patrice Freeman ?
Salut, Patrice Freeman se nomme en réalité GBEGBE DJEPE PATRICE. Je suis né à

Abidjan un certain 17 mars à 1h du matin. Je suis célibataire et père de 2

merveilleux enfants.


2. Que fais-tu dans la vie ?
Je suis Agent de Transports Maritimes sorti de l'Académie Régionale des Sciences

et Techniques de la Mer.
 

3. Comment définirais-tu le véritable esprit rasta ? 
Je ne suis pas vraiment versé dans la pure tradition des communautés rastas.

Mais je sais qu’elles pronent des valeurs nobles telles que la Fraternité, l'Amour

et l'Unité qui sont des valeurs, je dirai, en voie de disparition malheureusement.

Aujourd'hui, le nouveau maitre du monde, c'est l'argent. Un jour, j'ai entendu un

rasta dire que l'argent c'est Babylon. Or, nous savons tous, plus ou moins, ce que

Babylon représente pour les rastas. Ceci pour dire qu'à cause de l'argent, les

hommes n'accordent plus beaucoup d'importance à ces valeurs là. Alors, pour

répondre à ta question, je dirai tout simplement que le véritable esprit rasta, c'est

celui qui donne la priorité à ces valeurs. Parce que celui qui cultive l'Amour,

l'Unité et la Fraternité, il le fait parce qu'il a beaucoup de considération pour son

prochain et ça c'est pour moi le plus important.


4. Pour toi quel est l'artiste reggaeman Ivoirien qui incarne réellement cet

esprit là ?
Il y en a plusieurs mais je pense tout de suite à Naftaly. C'est un rasta plein.


5. Comment t'est venue la passion du reggae ?
(Rire) Waouh, je ne pourrai pas te dire exactement. Mais ça remonte à plusieurs

années en arrière. Mes Grands frères et amis d'enfance et moi, quand on se

retrouvait autour d'un pot, c'est du reggae qu'on écoutait tout le temps.
Ainsi quand il y'a eu l'avènement des concerts live dans les maquis et les bars ici

à Abidjan, mes Grand frères qui étaient plus imprégnés ont créé un groupe Le

KGS et moi j'apprenais à chanter auprès d'eux. Et depuis, ma passion n'a fait que

grandir. Jusqu'aujourd'hui, je ne rate pas une seule occasion de me retrouver

dans une ambiance purement reggae quoi.


6. Pourquoi ? Qu'est-ce que tu y trouves ?
C'est carrément magique (mdrrrrr*). Tu sais, vivre un concert en live et suivre un concert à la télé par exemple, c'est pas du tout pareil. L'effet n’est pas le meme. Quand tu es sur place, tu sens beaucoup plus le son. C'est trop chic man (rire).
J'aime le reggae en général, mais ce qui me tue, cest le <Roots >. C'est pausé, c'est mélodieux et tu as l'impression que les instruments te parlent. C'est difficile d'y résister, je t'assure (rire).


7. Généralement, l'on associe systématiquement le reggae à la drogue. Qu'en penses-tu ?
Chacun a son point de vue sur le sujet. Personnellement, je pense que c'est une erreur que les gens font. Je connais beaucoup de gens qui ne jurent que par le reggae, mais qui n'ont jamais touché à un joint. Par contre, j'en connais plein qui n'ont pas le moindre penchant pour le reggae, mais qui ne peuvent pas faire même une heure de temps sans allumer un pétard. Franchement qu'on arrête d'indexer les rastas quand il s'agit de drogue. Eux au moins, ils fument et ils assument. Ce n'est pas comme ceux qui le font et qui n'hésitent pas à se cacher pour accuser les rastas. Je trouve que c'est lache et immature. Si fumer un joint, c'est etre un drogué, alors là ! C'est que Abidjan est rempli de drogués parce qu'aujourd'hui, à tous les niveaux de la société, il y a plein de gens qui fument l'herbe. C'est meme devenu monnaie courante chez les jeunes qui ont à peine 20 ans. Ceux-là représentent la génération dite "Coupé-Décalé" qui n'a aucun lien avec le reggae. Et pourtant, ils passent leur temps à fumer ça dans les couloirs de leurs quartiers tard la nuit...

8. Selon toi, qu'est-ce que la musique reggae peut apporter à la société en général ?
Le reggae est une musique qui véhicule toujours des messages qui ont pour but d'éveiller les consciences, d'attirer l'attention des peuples et des dirigeants sur les maux qui minent nos sociétés. Il suffit d'écouter ce qui se dit dans les

chansons, de suivre les conseillent des artistes et je suis certains qu'il y a beaucoup de mauvaises choses qu'on pourra éviter. Il y a des artistes qui ont ce don de prédire l'avenir, mais on ne les écoute pas souvent. Bob Marley, en son temps, avait annoncé des choses qui se sont produites plus tard. Chez nous ici, notre Jagger national (Alpha Blondy) avait attiré l'attention des uns et des autres sur une éventuelle guerre civile. Personne n'a pris ça au sérieux. Il n'y a peut-etre

pas eu guerre civile, mais il y a eu un conflit profond.
C'est pour dire que le reggae, de par ses messages, peut nous aider à prévoir

et à éviter des choses négatives, à corriger des erreurs. Il suffit de preter

attention aux différents messages et surtout à les prendre au sérieux. Et ça,

ce n'est pas seulement chez les reggaemen. Le Zouglou également parle aux

consciences par des messages forts. Ailleurs dans le monde, il y a aussi des

musiques de message. Pour moi, ça compte beaucoup. Et à cela, quand on

ajoute une belle rythmique, il n'y a rien à faire, le message passe plus

facilement. J'ai parlé tout à l'heure de Fraternité, d'Unité et d'Amour que les

rastas pronent. Le monde se porterait tellement mieux s'il prenait le temps

de méditer sur ces valeurs là. Franchement !


9. A t'entendre parler, on est tenté de conclure que nos sociétés

d'aujourd'hui ont vraiment intéret à composer avec le mouvement rasta.
Oui, absolument. Je n'en doute même pas. 


10. Comment expliques-tu alors le fait que les rastas sont le plus souvent incompris et marginalisés ?
C'est simple. Ils ont leur philosophie, leur mode de vie, leur tradition. Celui qui ne se reconnait pas dans leur façon d'etre va forcément s'écarter d'eux. Et puis, ce sont des gens qui disent tout haut ce que beaucoup pense tout bas. Alors, ils deviennent genant pour les mauvaises consciences et parfois on refuse de leur donner la parole.


11. Ces dernières années, Abidjan a été une destination de choix pour les dinosaures de la musique reggae tels que Ijahman, U-roy, Steel Pulse, Morgane Heritage et bien d'autres. Peut-on considérer cela comme un signal fort pour l'avenir du reggae en Cote d'Ivoire ?
Oui, c'est sur que c'est un signal fort et j'en profite pour saluer et encourager les promoteurs de spectacle qui travaillent dans ce sens. J'ai entendu dire qu'Abidjan est, aujourdhui, la 3e capitale mondiale du reggae après Kingston et Londres. Je pense que c'est un gros atout qu'il serait bon d'exploiter parce qu'on a de très bons artistes et musiciens ici dans ce domaine. Je prends juste l'exemple d'Alpha Blondy, Tiken Jah et Ismael Isaac qui sont devenus incontournables en matière de reggae aussi bien en Afrique que dans le monde. Et derrière eux, on a de vrais talents comme Kajeem, Spyrow, Ras Goody Brown, Naftaly, KGS et bien d'autres. Ce sont eux qui vont assurer la relève et je pense qu'il faut les encourager. 


12. Qui doit les encourager et comment ?
Les autorités d'abord, ça me parait évident. Cela relève du Ministère de la Culture qui doit se battre pour mettre des moyens concrets à la disposition de ces artistes-là. J’aimerais à ce stade de mon propos féliciter le Ministre de tutelle Mr Maurice Bandamanque j’ai eu la chance d’avoir comme professeur de Français en second cycle au Lycée Classique d’Abidjan. Lui dire merci pour le travail qu’il fait pour la culture ivoirienne et aussi l’encourager car le connaissant, je sais qu’il peut faire encore plus.
Mais aussi leurs Ainés cités plus haut qui pourraient les prendre dans leurs tournées internationales. C'est important. Malheureusement, j'ai l'impression que le domaine de la Culture est relégué au second plan. Comme si ça n'était pas une priorité. Je m'excuse, mais ça l'est. La Culture fait partie des grandes richesses d'une nation et c'est une grosse erreur de la négliger.


13. Un dernier mot ?
Juste dire un grand merci à Reggaeslam.com de m'avoir donné la primeur de cette rubrique puisque c'est la première parution. Ce magazine en ligne est une très belle initiative que j'encourage. Big up à tous les férus de reggae et que Jah vous bénisse.


* mdr (Mort de rire)

Entretien réalisé par Coco Joyce

Patrice freeman

"Qu'on arrête d'indexer les rastas quand il s'agit de drogue"

Unknown Track - Unknown Artist
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